Recherche et nouvelles technologies : des avancées majeures

Progrès dans l’imagerie cérébrale, technologie organique, ontogénétique, découvrez avec Maxime Guye et Christophe Bernard comment ces technologies ont modifié ou modifieront la prise en charge des patients.

L’imagerie cérébrale joue un rôle majeur en épileptologie. Les progrès réalisés dans les 15 dernières années ont permis non seulement de changer la prise en charge des épilepsies partielles pharmacorésistantes mais aussi d’améliorer la compréhension des processus physiopathologiques de l’ensemble des épilepsies y compris des épilepsies généralisées idiopathiques (ou génétiques). Nous nous limiterons ici aux avancées majeures des 15 dernières années dans le domaine des épilepsies partielles.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est la méthode la plus utilisée. Elle a un rôle crucial dans le bilan préchirurgical des épilepsies partielles résistantes. Elle a l’avantage de fournir de multiples informations structurales et fonctionnelles de façon totalement non invasive. Au cours des 15 dernières années, cette technique a connu une amélioration fulgurante de : 1) l’instrumentation (aimants haut champ [3T] ou ultra-haut champ [7T]), antennes [acquisition parallèle du signal], gradients [plus rapides]) permettant une augmentation du signal, de la résolution, et de la rapidité/qualité d’acquisition ; 2) des séquences d’acquisition (ex : FLAIR, imagerie de susceptibilité, IRM fonctionnelle, imagerie de diffusion); 3) des méthodes de post-traitement et de quantification des données (ex : volumétrie, relaxométrie, diffusivité, anisotropie, tractographie, connectivité…).

L’impact de ces implémentations et nouveautés permet tout d’abord une augmentation de la sensibilité dans la détection de lésions potentiellement épileptogènes améliorant de façon significative le taux de réussite post-chirurgicale. De nombreuses lésions invisibles auparavant sont maintenant identifiables, c’est le cas par exemple de certaines dysplasies corticales. Un protocole d’acquisition minimal pour l’IRM morphologique est maintenant assez bien reconnu par la communauté internationale. L’IRM diagnostique a aussi un impact sur la prise en charge clinique après une première crise en identifiant une étiologie potentielle.

Sur le plan fonctionnel, l’IRM fonctionnelle (IRMf) réalisée au cours de tâches spécifiques permet la cartographie non invasive préopératoire de différentes fonctions (langage, mémoire, motrices), afin de minimiser/prédire les déficits postopératoires. L’IRM de diffusion définit quant à elle les faisceaux de substances blanches par la technique de tractographie et permet de minimiser certains déficits en préservant des faisceaux indispensables à certaines fonctions (optiques, motrices). De plus, l’IRM de diffusion et l’IRMf réalisée au repos permettent d’accéder à une quantification de la connectivité des régions cérébrales entre elles sur un plan anatomique et fonctionnel. Cette approche offre une quantification de la complexité et de l’efficacité des réseaux cérébraux impliqués et/ou impactés par les crises pour une meilleure compréhension des phénomènes pathologiques. L’apport scientifique de ces méthodes est majeur, mais l’impact clinique direct de ces techniques reste encore à déterminer. L’ensemble de ces travaux dans le domaine de l’épilepsie a fait évoluer de façon déterminante ces approches visant à mieux décrire et comprendre l’ensemble des réseaux complexes du cerveau (connectome) à diverses échelles spatiales et temporelles avec des applications très vastes en neurosciences et en neurologie.

La tomographie par émission de positons (TEP dite PET en anglais), en utilisant du glucose marqué au fluor (18F-FDG), a clairement démontré son utilité clinique notamment dans certains cas où l’IRM morphologique bien conduite est négative. De plus, de nouveaux marqueurs innovants ont été développés dans ces 15 dernières années avec des résultats encourageants. La tomographie par émission monophotonique (TEMP dite SPECT en anglais) percritique comparée à l’intercritique, fournit des indications pertinentes sur la dynamique des processus hémodynamiques au cours des crises en fonction du moment de l’injection, bien que son utilisation n’ait pas statistiquement démontré un effet sur les résultats post-chirurgicaux. Les techniques d’acquisition, de post-traitement et de quantification des données ont aussi été très largement améliorées en TEP et en TEMP, rendant les résultats plus objectifs. En outre, certaines méthodes d’imagerie permettent la localisation des activités électriques anormales et peuvent se révéler utiles pour localiser la région à réséquer (retirer chirurgicalement) de façon non invasive ou pour planifier l’implantation d’électrodes profondes.

C’est le cas des techniques d’imagerie utilisant l’électrophysiologie : comme le couplage de l’EEG et de l’IRMf de façon simultanée ; ou encore de l’imagerie de source électrique ou magnétique (à partir de l’EEG de surface ou de la MEG respectivement) dont des développements récents de l’acquisition (par ex : EEG haute densité) et des algorithmes de reconstructions de sources ont largement amélioré la localisation.
Ce résumé non exhaustif des développements des techniques d’imagerie montre les progrès réalisés et la potentialité du domaine. Bien que des efforts restent à faire pour valider l’utilité dans la prise en charge clinique au-delà de l’amélioration de la compréhension des mécanismes, il est important de noter que l’ensemble de ces développements offre une ouverture vers de nouvelles pistes thérapeutiques.

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ÉCLAIRAGE – CHRISTOPHE BERNARD
Apport des nouvelles technologies à l’épilepsie

Pendant longtemps, les avancées technologiques pour le diagnostic de l’épilepsie sont restées limitées à l’imagerie du cerveau dans ses diverses formes. Les électrodes d’enregistrement de l’activité électrique ont peu ou pas évolué. La prise de médicament n’a pas évolué. Ces dernières années ont vu l’apparition d’avancées technologiques majeures, qui pourraient arriver dans la recherche clinique :

  • L’apparition de la technologie organique pour enregistrer l’activité électrique avec une grande précision, tout en divisant leur taille par plus de 1000.
  • L’invention de nouvelles façons d’amener les médicaments dans les régions à traiter, comme la pompe électronique organique qui permet de délivrer des médicaments directement dans la région du cerveau à traiter (sans affecter le fonctionnement des régions saines), ou comme les petites capsules contenant les médicaments, que l’on ingère, qui rentrent dans le cerveau et peuvent ensuite être activées pour délivrer les médicaments dans une région précise du cerveau.
  • De nouveaux dispositifs, notamment grâce aux ultrasons, pour mieux voir ce qui se passe dans le cerveau.
  • L’optogénétique, qui permet de contrôler l’activité des cellules du cerveau avec la lumière d’un laser.

Ces nouvelles technologies ont été validées chez l’animal, mais le transfert à l’Homme peut prendre du temps. Par exemple, l’optogénétique implique d’injecter un virus qui va permettre aux cellules du cerveau d’être contrôlées par la lumière, ce qui pose des questions évidentes de sécurité. Néanmoins, ces techniques sont extrêmement prometteuses, et les chercheurs travaillent activement à leur transfert à la clinique.

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