Focus sur les avancées du Réseau Sentinelle Mortalité de l’Epilepsie

.Focus sur les avancées du Réseau Sentinelle Mortalité de l’Epilepsie

INTERVIEW DE MARIE-CHRISTINE PICOT
Bientôt 10 ans que le Réseau Sentinelle Mortalité de l’Epilepsie (RSME) existe et c’est important aujourd’hui de faire le point sur les actions menées et le chemin parcouru.

Vous vous occupez depuis début 2010 du Réseau Sentinelle Mortalité Épilepsie, les choses ont-elles avancé en matière de connaissance et prévention des risques de mortalité liés à l’épilepsie ?

Pour la prévention des risques de mortalité, la communication et l’information aux patients comme aux professionnels représente l’action la plus importante.

Le réseau représente une plateforme d’échange entre les professionnels de santé et les patients souffrant d’épilepsie. De nombreuses communications ont été faites autour du risque de décès pour informer les neurologues. Un site internet met à disposition des documents d’information sur le risque de mortalité lié à l’épilepsie afin de créer, pour les professionnels, les patients et leurs familles, un espace de communication et d’information favorisant le dialogue patient-médecin autour de la mortalité liée à l’épilepsie.

Le réseau RSME, en collaboration avec les associations de patients, a d’ailleurs élaboré une plaquette sur les risques liés à l’épilepsie destinée aux patients et à leurs familles, accessible sur le site. Enfin, les données recueillies dans le cadre de ce réseau ont permis la réalisation d’une étude cas-témoin, toujours en cours, sur les facteurs de risque de mort soudaine ou SUDEP (pour Sudden unexpected Death in Epilepsy) afin d’aider les médecins à mieux identifier les patients les plus à risque.

Le message de prévention passe-t-il facilement auprès des neurologues et de leurs patients ? Comment faire pour l’améliorer ?

Les neurologues sont conscients de l’importance d’informer sur les risques associés aux conditions de survenue des crises (noyade, brûlure, blessures liées à une chute ou un accident de la voie publique), mais sont encore partagés sur la question de l’information à donner aux patients et leurs familles sur le risque de décès à l’issue d’une crise et plus spécifiquement, sur le risque de mort soudaine. La décision d’informer est souvent prise en réaction au comportement du patient qui n’adhère pas correctement à son traitement et chez qui les crises ne sont pas contrôlées.

Le principal obstacle à l’information par le neurologue est le manque de connaissances du risque de SUDEP et des facteurs de risque associés. Il faut donc mettre à disposition de la communauté médicale une information compréhensible et juste sur la fréquence des SUDEP et les facteurs de risque évitables ou modifiables (facteurs provoquant les crises : consommation d’alcool, dette de sommeil, mauvaise adhésion…), insister sur la nécessité de gérer activement le traitement antiépileptique tant que les crises généralisées persistent (proposer une chirurgie ou ses alternatives, adresser à un centre d’épileptologie pour ré-évaluer le diagnostic et optimiser le traitement si nécessaire). Les médecins pensent souvent que les patients et leurs familles connaissent les risques liés à l’épilepsie. Mais, d’après les entretiens réalisés dans le cadre du RSME, les connaissances des risques sont très partielles. Il est donc nécessaire de répéter régulièrement les précautions à prendre pour limiter ces risques.

Au-delà de l’information, il est nécessaire de former les médecins pour les aider à mieux communiquer avec leurs patients afin de les accompagner vers une meilleure gestion de leur épilepsie. Les patients et leurs familles sont toujours très demandeurs d’information sur la maladie et les risques associés. De manière assez unanime, les parents d’enfants avec épilepsie souhaitent être informés du risque de SUDEP. Chez l’adulte, le souhait d’être informé est également très élevé (entre 60 et 90% selon les études). Or, le niveau d’information reste encore aujourd’hui très faible. Il est nécessaire de mettre à dispositions des patients et de leurs familles des supports d’information imagés (plaquettes, films) et faciles à comprendre que le patient va pouvoir consulter régulièrement et au moment opportun.

Sans chercher à affoler, quelles sont les précautions à prendre dans la vie quotidienne pour éviter en partie ces risques, particulièrement chez les patients qui font encore des crises ?

Tout faire pour réduire la fréquence des crises en particulier généralisées. Il est donc indispensable d’avoir une bonne hygiène de vie (sommeil suffisant, éviter les stress, limiter la consommation d’alcool) et de ne pas oublier son traitement. L’utilisation d’un pilulier doit être préconisée, et, pour les plus jeunes en particulier, des applications facilitant l’observance du traitement sont aujourd’hui disponibles. Si le patient est confronté à un stress, s’il souffre de troubles anxieux ou de troubles dépressifs, il doit en parler avec son médecin traitant ou son neurologue afin que ses troubles soient rapidement pris en charge par un traitement adapté, médicamenteux et non médicamenteux (mindfullness, psychothérapie …). En cas de crises généralisées nocturnes, l’utilisation d’un dispositif permettant de détecter et d’alerter en cas de crise (pour les enfants en particulier) apparaît comme une solution pertinente bien que les dispositifs actuellement sur le marché n’aient pas tous fait l’objet d’une évaluation clinique. L’utilisation d’oreiller alvéolé est également recommandée afin de limiter l’étouffement en cas de crises durant le sommeil.

Ces conseils peuvent être relayés par tous (associations, familles, médecin généraliste, neurologue …) et par tous les moyens de communication disponibles (plaquettes, site internet …).

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