Intelligence artificielle et bilan pré-chirurgical des patients atteints d’épilepsie pharmacorésistante

Carole LARTIZIEN, Centre de Recherche en Acquisition et Traitement d’Images pour la Santé (CREATIS), INSA‐Lyon

1/ En quoi consiste le projet pour lequel vous avez obtenu le financement  de la FFRE ?
J’ai obtenu un financement de la FFRE dans le cadre d’un appel d’offre ‘Interfaces’ qui cible des projets visant à appliquer à l’épilepsie des connaissances nouvelles issues d’autres disciplines.  
Environ 150.000 personnes souffrent en France d’une épilepsie partielle réfractaire à tous les médicaments. La chirurgie, qui constitue aujourd’hui le meilleur recours thérapeutique nécessite un bilan préopératoire complexe permettant de localiser précisément le ou les foyers épileptiques afin de planifier le geste chirurgical. Ce bilan inclut des examens d’imagerie non-invasifs tels que l’imagerie par résonance magnétique (IRM) anatomique et la tomographie par émission de positons (TEP) au fluorodéoxyglucose (FDG). L’information contenue dans ces données d’imagerie est riche mais souvent difficile à interpréter par l’équipe de neuroradiologues. Même combinée à d’autres examens de surface tels que la video-électroencéphalographie (vidéo-EEG), elle ne suffit pas toujours à détecter et localiser avec certitude le foyer responsable de la crise.
Mon projet a pour ambition de mieux exploiter l’information disponible dans les données d’imagerie IRM et TEP mais parfois inaccessible par une simple analyse visuelle. Dans cet objectif, je propose de développer un logiciel qui réalise, pour chaque patient, une analyse automatique de ces images et fournisse une cartographie personnalisée des foyers épileptiques. Cette carte sera utilisée par l’équipe de neurochirurgie en seconde lecture des images pour les guider vers certaines zones suspectes, et les aider ainsi à mieux cibler les foyers responsables de crises.
Ce projet fait appel à des méthodes développées dans le domaine de l’intelligence artificielle, et plus particulièrement des méthodes dites d’apprentissage statistique par machine (machine learning en anglais). Ce domaine de recherche est à l’interface entre le traitement d’image, les mathématiques appliquées, l’informatique et les statistiques. Il repose sur le transfert de méthodes innovantes du domaine de l’apprentissage statistique et leur adaptation aux spécificités et contraintes des données de neuroimagerie.

2/ Quels sont les résultats attendus ?
Ce projet va permettre de développer un logiciel d’analyse automatique des données d’imagerie et TEP au FDD. Ce logiciel fournira une cartographie des foyers épileptiques pour chaque patient. Il  permettra à l’équipe de neurochirurgie de mieux localiser le foyer responsable des crises et de planifier plus précisément le geste chirurgical. Nous espérons ainsi améliorer le pronostic postopéra¬toire des patients.

3/ En quoi peuvent-ils améliorer la vie des patients et dans quels délais ?
Le logiciel que nous proposons de développer doit permettre d’assister les cliniciens dans l’interprétation de ces volumes d’images cérébrales en les guidant vers les zones suspectes. L’objectif final est double. Il s’agit tout d’abord de permettre une meilleure sélection des candidats éligibles à une chirurgie en fournissant un bilan précis du nombre, de l’étendue et de la localisation des foyers épileptogènes. De plus, cette cartographie doit permettre d’améliorer la précision du bilan pré-chirurgical et affiner la localisation des cibles suspectes afin de préciser le schéma d’implantation des électrodes de SEEG.
Pour la prise en charge des patients, l’objectif est de mettre en évidence des lésions épileptogènes potentielles à partir d’un post-traitement des données d’imagerie. Ces analyses sont particulièrement pertinentes dans le cas des épilepsies pour lesquelles l’analyse visuelle classique des données d’imagerie est restée négative. A terme, cette approche devrait permettre d’améliorer les chances de succès de la chirurgie, car il est bien connu que la mise en évidence d’une lésion représente un facteur pronostique du succès chirurgical.

4/ Quelles sont les suites de ce travail et les perspectives possibles ?
L’objectif de ce projet est de développer un logiciel qui soit capable de détecter plus de 70% des foyers épileptiques non visibles en première lecture sur les examens d’imagerie IRM et TEP au FDG. Une fois ces performances atteintes, nous prévoyons d’évaluer l’impact de ce logiciel dans la pratique clinique des comités d’expert chargés de réaliser le planning pré-chirurgical des patients. Cette étude fera l’objet d’une étude clinique prospective réalisée en collaboration avec notre partenaire clinicien.

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